Présente au nombre de 11 sur le drapeau de la Bretagne, l’hermine est ce dessin noir comprenant 3 pointes dirigées vers le bas. Cet emblème se retrouve dans différentes époques de l’histoire de la péninsule. En effet, des récits sur l’hermine sont reliés aux blasons et aux chevaliers. D’autres associent ce symbole aux ducs et duchesses, tandis qu’il est aujourd’hui reconnu comme figure nationale, synonyme de pureté.

L’hermine à travers l’histoire

De la famille des Mustélidés, l’Hermine ou Mustela erminea est un petit mammifère à fourrure. Cet animal a un caractère curieux, vif et joyeux. Son pelage mue à travers les saisons. Au printemps, elle arbore une fourrure brune avec une pointe noire au niveau de la queue. En automne, elle devient toute blanche, sauf la partie noire qui est conservée. Douce au contact, la fourrure d’hermine a toujours été très prisée dans la confection de manteaux d’hiver des souverains.

L’on parle donc de moucheture d’hermine en référence à la zone noire ou mouchetée de la queue de l’animal qui fut séparée avant de la replacer de manière mieux cadencée sur le reste de la fourrure. Ainsi, les blasons des ducs de Montfort comprenaient une croix à trois branches, ainsi qu’une quatrième située en bas dont la longueur est réalisée avec la moucheture, et ce, pour obtenir facilement trois pointes. Sans entrer dans les codes de l’hermine, il est important de rappeler que ce symbole fait valoir l’innocence et la pureté dans de nombreux domaines. Dont les plus cités sont l’enseignement, la justice et la conduite. Chez les Amérindiens, ceux qui se coiffaient d’hermine indiquaient la pureté de leur dessein.

L’hermine médiévale

À l’époque des croisades, les boucliers des chevaliers fortunés furent recouverts de fourrures d’hermines. Ainsi, les couturières procédaient de manière à ce que les peaux soient placées côte à côte, avec la queue noire au centre. Trois barrettes sous forme de croix servaient de fixation. Cette amélioration fut nécessaire pour réduire le choc des épées se heurtant aux boucliers.

Au même moment, les croisés bretons avancèrent avec un drapeau blanc où figurait une croix noire située au centre. Ce symbolique se retrouvera plus tard sur le Gwenn ha Du, le drapeau noir et blanc reconnu comme symbole officiel de la nation bretonne. En héraldique, l’hermine devient une moucheture noire dessinée sur fond blanc. Ce choix de couleurs est un rappel de la fourrure blanche arborée par l’animal pour se camoufler en hiver, et ce, en gardant la partie noire de sa queue pour servir de diversion contre les prédateurs. Au fil de l’histoire, l’hermine a toujours été reliée au courage, à la pureté et à la noblesse. Raisons pour lesquelles un col d’hermine fut retrouvé sur les habits des représentants de justices et des membres importants du clergé.

Le duché de Bretagne et l’hermine

En 1214, Pierre Mauclerc de Dreux épousa Alix, duchesse de Bretagne. Parce qu’il est le cadet de la famille capétienne, engendrée par Robert Ier, fils du roi Louis VI, il n’eut pas le droit d’utiliser les armoiries. Il fut donc obligé de se servir d’une brisure herminée noire et blanche. Un siècle suivra où les armes de Dreux serviront aux princes bretons. Ces derniers se reconnaissent à un échiqueté d’or et d’azur, comprenant un champ d’hermines plain.

En 1312, Jean III devient duc. Il utilisera des hermines plain comme armoiries dès 1316. Durant l’an de grâce 1327, il fut le témoin d’une scène inédite. Des paysans furent en train d’effrayer une hermine blanche près d’un ruisseau. Au lieu de s’enfuir à la nage, l’animal préféra affronter ses agresseurs. Jean III en fin observateur conclut que l’animal voulu éviter de salir sa belle fourrure, au risque de se faire blesser par les humains. Le duc décida de sauver l’animal et en fit un emblème. La devise qui s’en suit est « Kentoc’h mervel eget bezan saotret » ou « Plutôt la mort que la souillure » en français.

D’autres légendes relient l’hermine à Anne de Bretagne, comtesse de Montfort, famille dont la moucheture d’Hermine fut le blason. L’on raconte également que lors d’une partie de chasse, la duchesse aperçut une hermine pourchassée par les chiens. L’animal ne put avancer face à un obstacle formé par une mare boueuse. Au lieu de traverser et risquer de se salir, l’animal préféra affronter la mort. Devant un tel courage, la duchesse décida de secourir l’animal et en fut un emblème. Cette histoire est aussi reliée à la devise de la Bretagne préalablement citée. Lorsque la duchesse Anne devient reine de France en 1499, elle conserva son blason et l’afficha fièrement dans tous les endroits où elle séjourna. Principalement au château d’Amboise et au château de Blois. De notre époque, l’hermine se retrouve sur de nombreux monuments historiques et modernes en Bretagne.

L’ordre de l’Hermine

En 1381, le duc de Bretagne Jean IV créa l’ordre de l’Hermine. Il s’agit d’un ordre de chevalerie fondé après la bataille d’Auray qui eut comme devise « A ma vie, comme j’ay dit ». En 1448, le symbolique est amélioré par un collier d’épis de blé tressés et l’on parle de l’ordre de l’Hermine et de l’Épi, ou simplement l’ordre de l’Espy. L’emblème fut un épi de blé dessiné à l’envers qui paraissait comme une moucheture d’hermine qui fut reliée aux armures de la Bretagne. Contrairement aux ordres de chevalerie plus connus tels que l’ordre de la Jarretière, l’ordre de la Table ronde ou l’ordre de l’Étoile, celui de l’Hermine était particulier. Il fut ouvert aux roturiers et aux femmes qui furent anoblis en arborant ses insignes.

Les mouchetures d’hermine sur le drapeau régional

Le drapeau noir et blanc ou Gwenn ha Du est le drapeau régional de la Bretagne. Sur le canton supérieur blanc du drapeau sont visibles des mouchetures d’hermine noires. Ces dernières représentent la Bretagne dans son ensemble. À savoir la province historique, la région administrative et l’ancien duché indépendant.

Au fil de l’histoire, les divers drapeaux d’hermine sont associés à une quête d’identification durant les mouvements et autres manifestations culturelles et religieuses. Parmi les plus référencés, il y a le scout Bleimor, des résistants bretons qui ont agi lors de la Seconde Guerre mondiale.

À l’origine de cette représentation du drapeau breton figure Morvan Marchal, architecte, poète, artiste et illustrateur. D’après lui, le quartier d’hermines innombrables situées au coin gauche du drapeau contribuait à créer un drapeau moderne. Selon ses explications de 1937, ce drapeau « n’a jamais voulu être un drapeau politique, mais un emblème moderne de la Bretagne, me paraît constituer une synthèse, parfaitement acceptable de la tradition du drapeau d’hermines pleines (sic), et d’une figuration de la diversité bretonne ». Pour ce qui est de l’hermine en canton, Marchal s’en servit pour faire un rappel des armoiries des duchés de Bretagne. Un rapprochement du Gwenn ha Du à la bannière de Maurlec comprenant un quartier d’hermines près d’un champ à damier ou rayé a aussi été observé.

L’interprétation actuelle des mouchetures d’hermine sur le drapeau breton est la glorification de la Bretagne traditionnelle. Une manière de permettre aux Bretons de se sentir fiers de leur culture et de leurs traditions. L’hermine est également reconnue comme emblème de la duchesse Anne. Plus tard, sa fille, Claude de France, arborera à son tour l’hermine et l’associe aux emblèmes de son mari, François Ier. C’est pour cela que l’hermine est aussi visible dans d’autres châteaux où le couple royal a séjourné.

Créé en 1925, le Gwenn ha Du de Morvan Marchal rappelle donc les armes de Rennes où sont placés des hermines et des bandes verticales de couleur noire et blanche. Après de vifs rejets de la part des partisans de l’identité bretonne, le drapeau sous sa forme modernisée ne sera utilisé comme emblème de la région qu’après une cinquantaine d’années.

Ainsi, 11 mouchetures d’hermine figurent sur le drapeau breton. Mais la signification de ce nombre n’est pas encore précisée. Les théories sur le sujet sont nombreuses. Parfois, le chiffre 11 est relié aux saints de la Bretagne. En majorité catholique, les Bretons associent également les hermines du drapeau breton au clergé. Une histoire qui se confirme avec l’accession au pouvoir de Pierre de Dreux, ancien prêtre qui fut de l’hermine l’emblème de la Bretagne en 1212. Ainsi, le drapeau breton n’est pas le premier qui utilise l’hermine comme symbolique. D’ailleurs, il existe d’autres drapeaux qui ont marqué l’histoire de la région. Parmi les plus célèbres figurent la bannière d’hermine, la croix noire ou encore le pavillon à croix noire herminée. Quoi qu’il en soit, le Gwenn ha Du est la version la plus moderne qui est désormais reconnue comme emblème de la Bretagne.

Comme le lys associé aux rois de France, les hermines du Gwenn ha Du renvoient à l’image des ducs de la Bretagne. Dans le pays bigouden, au sud-ouest du Finistère, le drapeau arbore également les hermines et les bandes horizontales. La seule différence se situe au niveau du choix des couleurs rouge et jaune. Quoi qu’il en soit, le symbolique de l’hermine comme emblème de la région est bien respecté. Pour ce qui est des bannières, le drapeau hermine plain est toujours utilisé dans les manifestations culturelles et historiques.